Viscères

Mo Hayder

Les Presses de la Cité

  • Conseillé par
    28 février 2015

    Un très grand Mo Hayder !

    Le paradoxe de la lumière qui nous plonge dans les ténèbres

    Fétiches, son désormais avant-dernier roman, montrait déjà un retour à la puissance narratrice et à la virtuosité de Mo Hayder. Viscères atteint des sommets ! La montée de l'angoisse y est constante, implacable, sinueuse et sinistre. Elle s'insinue, insecte importun dans une jambe de pantalon, reptile secret dans un sac de couchage. La peur immobilise la proie, ne lui laissant que le loisir de tourner fiévreusement la page espérant y trouver enfin quelque happy end ou, du moins, le signe d'une possible rédemption. N'y comptez pas, Mo Hayder n'est pas d'humeur.

    Ou plutôt si, mais d'humeur sombre, d'une insondable noirceur même. Impossible de vous livrer le moindre indice sans dénaturer l'intense suspense, les merveilles d'intrigues de Viscères. L'auteur joue de ses personnages comme un montreur d'ombres chinoises. Celles-ci ne se définissent qu'au travers le subtil équilibre entre l'obscurité et lumière, le moindre changement dans le dosage ou l'angle de l'une ou l'autre et c'est la nature même du motif qui se transforme.

    Pourtant, l'être humain, poussé par l'instinct, par la peur de l'inconnu, cherche la lumière. Il souhaite explorer ses ténèbres, au risque de s'y brûler, d'en être transfiguré à jamais...La vérité n'est pas et ne sera jamais un remède pour Mo Hayder Au contraire ! Elle ne sera qu'un ingrédient qui redéfinira l'existence des protagonistes sans, loin de là, l'apaiser.

    Osez tourner la première page et laissez toute espérance...

    Mo Hayder tisse une histoire, elle ne philosophe pas sur tel ou tel être suprême ou génie du mal, l'humain lui suffit et elle y trouve largement matière à nous pétrifier. Ce qui ne l'empêche pas de livrer un ouvrage avec plusieurs niveaux de lecture, une symbolique riche et une pensée profonde du monde. Le tout servi par une écriture crue (remarquablement traduite), puissante mais sans artifice - elle ne surjoue jamais - touche juste et crucifie la moindre espérance d'évidences terribles.

    Ses personnages sont des phalènes. Fascinés, ils se précipitent, comme hypnotisés, vers la flamme du savoir ou de la vengeance qui les anéantira. Du boulot remarquable, l'ensemble du récit sue l'angoisse, le machiavélisme et la maîtrise totale de l'écrivain qui sait où il va nous mener bon gré mal gré.

    Un immense thriller, un modèle du genre, un mix extraordinaire entre ses deux premiers chefs d'oeuvre, Birdman et L'Homme du soir, le talent intact, avec une pointe de virtuosité en plus qui pose Viscères comme l'un des meilleurs polars que j'ai jamais lu. Mo Hayder, malgré quelques ouvrages moins percutants ces dernières années, est toujours une des reines de la peur et du noir, vraiment très très noir. Ne passez surtout pas à côté de cette splendeur !

    Suite de la chronique et la musique du livre sur Quatre Sans Quatre http://quatresansquatre.com/article/chronique-livre-visceres-de-mo-hayder-1422202927


  • Conseillé par
    31 janvier 2015

    Policier, Angleterre

    Que c'est diabolique ! Que c'est bien pensé et bien ficellé ! C'est retors à souhait.

    Une intrigue de base, dans laquelle s'enchevêtre intelligemment une seconde intrigue puis une troisière, sans jamais nous perdre.

    Il y a donc la famille Anchor-Ferrers qui arrive dans sa maison de campagne. Mais l'arrivée de deux policiers bouleverse le repos prévu. Sont-ce vraiment des policiers ? Très vite, le doute s'installe.

    Il y a ensuite le chien perdu qu'une petite fille trouve en allant cueillir des fleurs. A qui appartient ce chien avec un message dessus ? Qui est l'homme qui accompagne le chien ?

    Dès les premières pages, le suspens est à son comble et la tension monte, doucement mais sûrement.

    Un huis-clos dans la maison de campagne, une enquête de Jack Caffery pour retrouver le propriétaire du chien.

    Des indices disséminés ça et là pour nous aider à trouver le coupable improbable.

    La lumière omniprésente dans le roman.

    Et un tueur en série qui ronde sans doute encore dans le Pré aux ânes si proche.

    Que du bon.

    L'image que je retiendrai :

    Celle de la petite tâche de sang dans la cuisine, premier indice semé par le coupable.

    http://motamots.canalblog.com/archives/2015/01/29/31418496.html


  • Conseillé par
    14 janvier 2015

    Trop sadique pour être vrai

    Il fallait bien que cela arrive un jour. Après nous avoir comblés de grands frissons délicieusement horrifiques, Mo Hayder, la Belle Blonde de Bath, s'est un peu emmêlée dans les ingrédients d'une recette que l'on croyait éprouvée. Ces " Viscères " qu'elle nous livre pour la septième enquête de l'inspecteur Jack Cafferty dégagent même un parfum pas très frais de stéréotypes et de violence gratuite.

    Mue une fois encore par son obsession de l'enfermement, l'auteur de " Birdman ", " Tokyo ", "Rituel ", " Skin " et des " Proies " imagine un " home-jacking " cruel, s'éternisant sur plusieurs jours, où deux faux flics tordus séquestrent une riche famille anglaise – parents âgés et fille dépressive – pour leur infliger une lente séance de torture psychologique. Leur vaste résidence secondaire victorienne est loin de tout, le téléphone et les alarmes coupés. Dans le Somerset, personne ne vous entend hurler.

    Problème n°1 : à force de pousser le curseur du sadisme pour donner au public son comptant de trouille, Mo Hayder perd de vue ces pauvres otages, bientôt réduits au rôle de chair à pâté. Le thriller a beau être le royaume de la noirceur, pour amener le lecteur à y croire, il faut bien montrer un minimum d'intérêt pour ses personnages, sans même parler d'empathie. Miss Mo, elle, choisit de les martyriser comme si elle regrettait de les avoir créés...

    Ce qui pourrait sauver l'affaire, c'est cette quête dans laquelle se lance parallèlement l'inspecteur Jack Caffery. Aidé du Marcheur, vagabond hanté par la mort de sa fille comme lui-même l'est par celle de son frère, le policier veut enfin dénouer cette disparition qui le hante. On devine qu'il va finir par se rapprocher de la prise d'otages qui tourne mal. Problème n°2 : ce huis clos infernal n'est pas si hermétique que l'auteur le voudrait. Avec un peu de flair, on devine où sont les clefs...

    Mo Hayder aurait-elle surestimé ses fans ? Pour les dissuader et leur éviter une terrible déception, on serait presque tenté de leur dévoiler l'issue de cette grand-guignolade paresseuse, de leur dire avec qui part l'inspecteur Jack Caffery, sa mission accomplie. Cela ne se fait pas. On se contentera de conseiller la relecture d'un de ses précédents romans.

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