La Littérature en suspens, Écritures de la Shoah
EAN13
9782954105956
ISBN
978-2-9541059-5-6
Éditeur
L'Arachnéen
Date de publication
Collection
ARACHNEEN
Nombre de pages
224
Dimensions
24 x 17,1 x 3,5 cm
Poids
1030 g
Langue
français
Fiches UNIMARC
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La Littérature en suspens

Écritures de la Shoah

L'Arachnéen

Arachneen

Indisponible
La littérature en suspens est consacré aux textes de ceux qui ont entrepris de témoigner des camps nazis et de la Shoah en faisant oeuvre. Il réfléchit le statut incertain et le caractère tourmenté de ces oeuvres qui témoignent d’une forme de "désappartenance" humaine, et cherche en elles les effets de cette scission : quelle tension produit le fait de témoigner d’une rupture anthropologique à l’intérieur du système de valeurs qu’est la "littérature" ? Ce qui a lieu alors n’est pas un adieu à la littérature, ni sa complète disqualification, mais sa crise et sa critique, implicite ou explicite, à la manière d’une mise en "suspens".
L’ouvrage distingue les "Théories et paradigmes" (I) et les "Œuvres" (II), en prenant un double parti : celui d’abord d’historiciser les discours critiques et paradigmes qui se sont développés à ce sujet, en différenciant ce qui s’est joué en Occident et en Europe orientale (URSS et Pologne), selon les expériences historiques, les expériences politiques et leurs horizons culturels d’inscription ; celui ensuite de s’immerger dans certaines œuvres où l’art se voit à la fois requis et rejeté, ou mobilisé et questionné : celles en particulier de trois déportés politiques (David Rousset, Charlotte Delbo, Jean Cayrol), puis d’écrivains juifs rescapés de l’extermination (Etty Hillesum, Piotr Rawicz, Jean Améry, Imre Kertész, Georges-Arthur Goldschmidt, Aharon Appelfeld).
La question des rapports entre "témoignage" et "littérature" est ainsi reposée en considérant un corpus plus vaste et différencié que le canon d’où émergent les théories du pseudo "genre testimonial" jusqu’ici mobilisées ; au parti pris d’une philologie critique se joint une approche de type anthropologique attachée à préciser le rapport entre l’acte de témoigner et le jeu de la création, et à comprendre la place du serment et du rituel dans ces écritures sécularisées.
David Rousset, Charlotte Delbo, Jean Cayrol, Etty Hillesum, Piotr Rawicz, Jean Améry, Imre Kertész, Georges-Arthur Goldschmidt, Aharon Appelfeld... Ces auteurs ont été soumis à une monstruosité systématique : celle des camps nazis, celle de la "destruction des Juifs d’Europe", qui, lorsqu’elle n’annihilait pas sur-le-champ les corps, étouffait tout foyer de pensée et de parole. Contre cet écrasement, Catherine Coquio lit dans les textes l’âpre combat de leurs auteurs pour saisir ce qui excédait toute "expérience", ce qui jamais ne se laisserait ramener à un moment de leur passé. Pour ces oeuvres irremplaçables, ce grand livre se fait tout d’attention et de pensée. Il lui faut aussi revenir sur l’histoire des "paradigmes" qui se sont formés au sujet du témoignage, et défaire les présupposés qui, trop souvent, nous ont rendus aveugles à ce qui s’était déroulé ailleurs, dans l’Est de l’Europe et en URSS. À déchiffrer les récits et fables des revenants des camps à côté des textes de la "Hurbn Literatur" et de la "Littérature des ravins", une vaste et indomptable interrogation se déploie : qu’est-il arrivé à la culture en Europe et à ce qui, édifié au fil des siècles en tant que "littérature", se trouva, sous le coup d’événements démesurés, non pas annulé mais (selon la formule d’Imre Kertész) "mis en suspens" ? Catherine Coquio sait nous rendre contemporaines – si lointaines, si proches – ces voix qui ne cesseront plus de nous accompagner. Ainsi le bouleversant dernier chapitre nous fait-il entendre, et pour jamais, les timides et lucides paroles de ces enfants qui vont disparaître : "Moi, petite créature, écrit Hanuš Hachenburg, je demande au monde l’aumône ... pour qu’il ne me brûle pas de son brasier ardent..."
Claude Mouchard
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