Muhammad Ibn Arabi

Biographie

Muhyî-d-dîn Ibn al-'Arabî est né en 560H/1165 à Murcie en Andalousie d'une
famille qui comptait plusieurs membres appartenant au soufisme. Il arriva à
Séville à l'âge de huit ans, y fit ses études et y mena la vie aisée d'un
adolescent issu d'une famille noble. Très tôt cependant, lors d'une maladie
qui le fit passer pour mort à son entourage, il eut une vision qui détermina
sa vie spirituelle. Tout en soutenant que sa connaissance lui fut communiquée
sans intermédiaire, on sait cependant qu'il servit de nombreux maîtres
spirituels d'Espagne et d'Afrique du Nord, notamment en Tunisie, en Egypte et
à Jérusalem et mentionne Abû Madyan comme son maître bien qu'il ne le
rencontra sans doute jamais. Tout en voyageant beaucoup, jusqu'en 590H/1194,
Ibn 'Arabî garda longtemps Séville comme point d'attache. Il séjourna deux
années à La Mecque où il se rendit, pour la première fois, en 598H/1201 et y
eut de nombreuses ouvertures et visions. C'est là où il reconnut dans la Ka'ba
le point de jonction entre les mondes de l'invisible (ghayb) et du visible
(shuhûd) et où il commença son ouvrage le plus fameux, les Futûhât al-Makkiyya
qui comprend plusieurs milliers de pages (l'oeuvre a été qualifiée de « Bible
de l'ésotérisme en Islâm »). Il se rendit ensuite en Syrie puis revint à
Jérusalem, au Caire et à La Mecque enfin à Konya et à nouveau en Syrie. Outre
Bagdad, il visitera aussi Alep et Sivas. Mais, à partir, de 612H/1216, il
demeura surtout à Malatya en Anatolie où naquit son premier enfant, un fils,
en 618 H/1221. Après avoir vécu célibataire une bonne partie de sa vie, il se
maria plusieurs fois et eut au moins deux fils. On ignore exactement quand il
s'établit à Damas mais sa présence n'y est pas attestée avant 627H/1230, année
où il fut en butte aux critiques des exotéristes mais défendu et protégé par
de nombreux docteurs de la Loi. Ce fut à la suite d'une révélation qu'il eut
cette même année, qu'il écrivit son second ouvrage majeur, les Fuçûç al-hikam
(en français « Les Chatons de la Sagesse »). Il raconte en avoir reçu
l'intégralité en une nuit du Prophète lui-même. Dans ce texte, la Sagesse est
représentée par une pierre, symbole de la Tradition ; si la pierre est la même
pour tous, elle est taillée différemment selon les formes traditionnelles et
les Prophètes. Il mourut en 638H/1240 à Damas. Il fut sans doute, à tous
points de vue, le plus fécond de tous les auteurs soufis. Dans son Histoire et
classification de l'oeuvre d'Ibn Arabi, Osman Yahia répertorie 846 ouvrages
qui lui seraient attribués, Ibn 'Arabî lui-même ignorant, du reste, combien de
livres il avait pu écrire. Cette prolixité fabuleuse et le fait qu'une bonne
partie de ses textes n'existe qu'à l'état de manuscrits rendent difficile un
aperçu et une compréhension de sa doctrine et de son enseignement dans son
ensemble. Aucun spécialiste n'a d'ailleurs jamais eu accès à la totalité de
son oeuvre ni même ne saurait affirmer avoir compris tous ceux publiés,
certains d'entre eux nécessitent certaines clefs qui ne sont plus guère
transmises. Il n'en reste pas moins qu'en général, ses écrits sont souvent
beaucoup plus accessibles que la piètre qualité des traductions (ou la
prétention délirante de certains traducteurs) le laisse entendre. Ibn 'Arabî
puise dans les sources islamiques et soufies mais aussi relevant d'autres
traditions (n'oublions pas qu'il fut appelé aussi Ibn Aflatûn, le « fils de
Platon »). Parmi les plus célèbres des maîtres ayant connu son influence, on
mentionnera Qûnawî, Nâbulsî et l'Émir 'Abd al-Kader qui en fut le premier
éditeur et dont les Mawâqif (« Le Livre des Haltes ») sont profondément
marqués par sa doctrine. En Occident, l'oeuvre de Raymond Lulle n'est pas sans
présenter des points de rencontre avec certains aspects de son enseignement.
Il professa également la doctrine de l'amour spirituel qui est au coeur de la
tradition des Fidèles d'amour et on sait que la Divine Comédie de Dante n'est
pas sans rapports avec ses Futûhât al-makkiyya. Considéré comme « le plus
grand des maîtres » (shaykh al-akbar), son influence fut fondamentale. On lui
doit l'organisation du soufisme en confréries tel qu'on le connaît
aujourd'hui. Il est considéré par beaucoup comme le Muhyî-d-dîn, le «
vivificateur de la tradition » par excellence, et c'est aussi son surnom le
plus connu.

Contributions de Muhammad Ibn Arabi