Laurence G.

Libraire passionnée à Epinal depuis 2013.

1ère tournée

1

Delcourt

12,50
Conseillé par (Libraire)
23 avril 2019

Ahahahah! Fabcaro: à lire et à offrir sans retenue!

Fabcaro est un homme à l’humour parfois limite mais qui fait mouche à tous les coups ! Après ses excellents "Zai zai zai zai", ou encore "Moins qu’hier, plus que demain", voici un nouvel opus dans la même veine, une suite de saynètes tirées du quotidien de M. et Mme Toulemonde, chaque situation étant menée à la limite de l’absurde.
Son coup de crayon épuré et l’utilisation de la bichromie mettent en relief ses dialogues succulents, reflets critiques de notre société et de son conformisme . On adore !!!

Conseillé par (Libraire)
23 avril 2019

Une excellente BD au scénario comme au dessin!

1972 : Max, 20 ans, débarque au Brésil à la mort de sa mère pour essayer de découvrir qui est son père. Muni simplement de 2 photos où on le voit, bambin, avec sa mère et deux hommes différents sur chacun des clichés, il se rend au village où il a vécu ses premières années et va rapidement découvrir un pays gangrené par la violence, la corruption et des trafics en tous genres.
On retrouve avec beaucoup de plaisir Loisel en très grande forme dans cette aventure humaine joliment croquée par Olivier Pont.
Un gros coup de coeur du Moulin des Lettres!

Conseillé par (Libraire)
26 février 2019

Magnifique et terrible, un très grand roman!

650 pages, autant dire un pavé, vont vous plonger dans l’Amérique des propriétaires terriens du Kentucky à la terre fertile et à l’herbe bleue, et dans l'histoire de ceux qui les ont rendus riches et arrogants, les esclaves : un roman brillant et dense qui vient d’être publié dans la collection « Du monde entier » chez Gallimard, écrit par une jeune femme presque inconnue puisqu’elle n’a publié qu’un seul roman précédemment.
Le lecteur va suivre la destinée d’une famille, les Forge, arrivée au Kentucky il y a 7 générations, emplie de la certitude d’être la maîtresse de ces terres et dont la fierté du nom est la colonne vertébrale.
Le jeune Henry Forge, dont on va suivre le parcours de façon plus intime ainsi que celui de sa fille, Henrietta, déclare à son précepteur tout juste arrivé au domaine :

« Le Kentucky est le plus grand Etat de l’Union.
- En êtes-vous sûr ? répliqua l’homme
- Absolument.
- Plus grand même que le New Jersey ? » Il tortilla ses lèvres d’un air vaguement amusé.
Henry ne saisit pas la plaisanterie, il écarquilla les yeux. «  Des gens ont risqué leur vie pour arriver jusqu’ici et fuir des Etats comme le New Jersey. Quand ils ont banni l’esclavage en 1804, de nombreuses familles ont migré vers le Sud avec leurs Nègres pour s’install-
- Leurs Noirs ». L’homme inclina la tête sur le côté, un sourcil levé. « Vous vouliez dire Noirs, non ? »

Quand Henry hérite du domaine, il décide d’arracher le maïs et le tabac qui ont fait jusque-là la fortune de la famille et le transforme en haras pour y élever des purs-sangs et créer le cheval qui mettra tous les autres à terre. Obnubilé par sa passion, il se lance dans cette entreprise et y consacre sa vie tout en léguant son obsession à sa fille qu’il va éduquer dans le but de poursuivre son grand œuvre.
La dynastie Forge fonctionne en circuit fermé, d’autant que la mère de Henrietta a fui le domaine pour l’Europe en laissant à son mari le soin d’élever la fillette qui se révèle brillante et aussi déterminée que son père à créer des chevaux exceptionnels. C’est à ce moment-là que va débarquer Allmon Shaughnessy, embauché comme groom et premier Noir à travailler dans le haras des Forge.
L’histoire va et vient dans le temps et nous ramène à ce qu’ont enduré les ancêtres d’ Allmon et ce que lui-même va devoir supporter ; elle raconte le sort qui s’acharne sur les Noirs de Cincinnati et d’ailleurs, hommes ou femmes, jeunes ou vieux et qui les remplit de haine et de volonté de vengeance.
L’écriture puissante de E.C. Morgan est complexe et nous entraîne dans ce qui fonde l’histoire des Etats-Unis, mais elle fouille également le tréfonds des âmes tout en dépeignant la nature et le monde des chevaux de façon superbe. Un très grand roman, assurément, et une auteure à suivre.

15,00
Conseillé par (Libraire)
26 février 2019

Un roman à la langue âpre, un poème dédié aux "vies minuscules".

Ida : le prénom claque comme la langue de Bessette qui ne cherche pas à enjôler le lecteur mais bien à le bousculer; son style est cinglant et âpre, la phrase hachée.
Dans ce 4ème volume des œuvres de cette auteure oubliée, morte en 2000 et heureusement republiée par les éditions du Nouvel Attila, on découvre peu à peu une femme qui n’est d’abord qu’une ombre, un bloc noir, un cadavre enfin, car elle vient d’être renversée par une voiture.
Ida a 65 ans et a servi toute sa vie comme domestique. C’est par la voix de sa dernière patronne, qu’on va découvrir peu à peu sa personnalité, même s’il est bien entendu que cette femme n’a jamais essayé ni de la comprendre ni de la connaître. Aucune aménité dans son portrait d’Ida à peine disparue, tantôt perçue « inquiétante», tantôt « agaçante », qu’on n’a jamais réussi à cerner et qui a toujours maintenu une réserve muette face aux questions personnelles.
Ida, à la morgue, est « un corps desséché sans grâce et sans proportion. Comme tant d’autres ». C’est une vie qui se reflète dans le vide et qui rejoint tant d’autres existences semblables, toutes centrées sur le labeur répétitif et monotone, imposé et accepté, une « vie minuscule » aurait dit Pierre Michon.
Sous forme de conversation à une seule voix, Hélène Bessette parle « du possédant et du possédé », de la servitude, de la fatigue du corps, de l’extrême solitude, de la douleur de ne rien construire à soi -ni maison, ni avenir-, car point de mari et point d’enfants.
Ida est cependant présente tout au long de ce texte ; sa silhouette s’impose à nous; ses pensées nous arrivent par bribes, mises entre parenthèses, et viennent se positionner en miroir de tout ce que peut dire d’elle sa patronne qui s’étonne de découvrir une Ida inconnue tandis qu’elle vide sa chambre :
« Puisqu’on cherche à la connaître maintenant
Pour ne pas l’avoir connue
Plus tôt
Méconnue
Pour n’avoir frôlé que l’esquisse
Ida
l’esquisse-Ida. Dessin hâtif. »
On lit ce roman d’une traite ; à la fin, on ne peut que dire « bravo, Madame, et merci ».

Journal 1965-1966

Gabriella Zalapi

Zoé

Conseillé par (Libraire)
21 janvier 2019

Un très beau texte, court et puissant!

Que de belles découvertes grâce aux Editions Zoé ! Notre "prix du Moulin des Lettres 2017" avait déjà mis en avant le très beau roman de Richard Wagamese "Les étoiles s'éteignent à l'aube".
En cette rentrée littéraire 2019, voici un nouveau petit bijou de cette belle maison d'éditions suisse, écrit par une jeune artiste plasticienne, Gabriella Zalapì, dont c'est le premier roman: un faux journal, court, brûlant, tenu par une jeune épousée de 30 ans, sicilienne, à qui son mari, notable palermitain, ne demande qu’une chose : être femme au foyer et mère. Antonia tente de s’évader de ce carcan insupportable en compulsant les documents familiaux laissés par sa grand-mère à sa mort, ce qui va lui permettre de faire un travail sur elle-même et de trouver la force d’échapper à son enfermement mental et physique. Le journal est bref et retrace deux années de la vie d'Antonia; les annotations courent sur une ou deux pages et peuvent tenir aussi en quelques lignes, toujours denses. On saisit pleinement, malgré la brièveté du texte, la souffrance, la façon dont se débat cette jeune femme et l'urgence de sa quête. Quelques photos accompagnent de façon originale les annotations d'Antonia et renvoient aux clichés familiaux que nous découvrons en même temps qu'elle tandis qu'elle essaie de se remémorer et d'affronter des scènes et des moments de son enfance. Superbe !