Ma mère, cette enfant

Et si le féminisme, c'était d'abord remettre la femme en question plutôt que dénoncer les hommes ?
On ne naît pas femme, on le devient (Simone de Beauvoir). Mais qui mieux que les mères pour incarner les modèles qui nous font devenir femme ? s'interroge Paule Giron. Si les luttes féministes, et particulièrement les mouvements radicaux, ont concentré leurs efforts sur le patriarcat et les hommes, elles ont peu remis en question la place des mères dans la reproduction des schémas de genre. Elles ont pourtant un rôle fondateur dans la construction de l'identité féminine de leurs filles, qu'elles finissent par s'identifier à leur mère ou la rejeter totalement. Paule Giron, 95 ans, se place résolument à contre-courant d'une position victimaire. Comme beaucoup de femmes de sa génération, celle qui a connu " le " siècle de l'émancipation féminine, elle s'est construite en opposition à une mère piégée dans un asservissement domestique et marital. Elle explore toute la complexité du lien mère-fille entre une génération qui s'est laissée enfermer dans un rôle de martyr et celle qui, portée par les révolutions anticonformistes, a refusé ce modèle. Mais la maternité rebat les cartes de ses certitudes. Lorsque son fils est diagnostiqué à tort autiste, elle courbe l'échine devant les exigences des médecins qui associent autisme et mère incapable. Il lui faudra près de 15 ans pour se sortir de cette place de bouc émissaire. À rebours du féminisme actuel, elle invite les femmes à concevoir leur autonomie sans s'enfermer dans une guerre des sexes. Elle prend position sur les grands débats de société autour des questions de genre (transidentité, homosexualité...) et interroge les dérives d'un féminisme dictatorial de l'entre-soi.