Changer

Le vote du 29 mai, après celui du 21 avril, a révélé la profondeur de notre crise politique. Les signaux de malaise se multiplient, dans un climat délétère d'opposition de la "France d'en bas" contre la "France d'en haut". Les Français attendent un changement de politique. Il est nécessaire. Mais il ne sera possible que si nous changeons la politique. Face à une crise morale et institutionnelle, c'est là un préalable que nous ne pouvons ignorer. «Notre crise est avant tout une crise de confiance, qui frappe la classe politique. Sous l'action des opportunistes de tout poil et des rentiers du mensonge électoral, la parole politique a perdu presque toute sa valeur. Nous ne sortirons pas de cette situation, extrêmement dangereuse pour la démocratie, si nous ne retrouvons pas le sens éthique de notre engagement politique. C'est également une crise de nos institutions. Nous souffrons d'une invraisemblable concentration de pouvoirs dans les mains d'un seul homme, irresponsable politiquement et pénalement, agissant hors de tout contrôle. Nous souffrons de l'abaissement du Parlement, que l'on réduit à jouer le double rôle du café du Commerce et d'une chambre d'enregistrement. Nous souffrons du manque d'indépendance de la justice, du rôle accessoire auquel le pouvoir cantonne les collectivités locales, de la faiblesse des corps intermédiaires, du cumul des mandats, de l'utilisation abusive des moyens d'information, et j'en passe. Plutôt que de réconcilier, comme on le dit souvent, notre peuple avec ses institutions, il est urgent de donner aux Français des institutions qui leur conviennent. On me dira que cela n'intéresse pas les Français, et que ce qu'ils veulent, c'est un emploi, un logement, une école. Assurément. Mais si l'on veut un gouvernement capable de procurer à chacun un emploi stable, un bon logement, une école de qualité, alors il faut au préalable amender nos pratiques et réformer nos institutions. C'est à cette condition que la politique retrouvera sa noblesse, et la société sa respiration. Et que l'on pourra, alors, changer la vie.» Jack Lang